Alexis, la vie magnétique, Editions du
Rocher
Présentation
de l'éditeur
Alexis,
la vie magnétique s'inscrit dans la tradition des
grands romans-feuilletons du 19e siècle, où
Christine Brusson ressuscite le tourbillon de la vie parisienne
entre 1837 et 1870, avec quelques incursions sur la scène
londonienne. Au fil des chapitres, qui portent chaque
fois le nom d'une carte du tarot, nous suivons l'irrésistible
épopée d'Alexis, le fils de cordonnier devenu
somnambule de renom par-delà les frontières
grâce à la ténacité de son
magnétiseur : Marcillet, l'ancien de Waterloo qui
n'a pas son pareil pour mater les foules les plus hargneuses.
Car le mystère du magnétisme n'est pas bienvenu
dans un monde dominé par la rationalité
où les sceptiques sont légion. De plus les
magnétiseurs qui officient en 1840 appartiennent
surtout à la race des illusionnistes mettant en
scène des somnambules sur les Boulevards. A chaque
séance, Alexis et Marcillet doivent donc faire
la preuve de leur étrange savoir. De quoi s'agit-il
? Aussitôt plongé dans un sommeil artificiel
par Marcillet, Alexis est soudain capable de découvrir
l'histoire des objets qu'on lui place entre les mains
puis de leurs propriétaires. Ses yeux ont beau
être bandés, sa seconde vue est infaillible.
Il visite ainsi en imagination les appartements, décrit
le contenu des lettres cachetées, repère
la rue où se dissimule tel équipage volé,
retrouve le nom d'un soldat français sauvé
sur le champ de bataille rien qu'en contemplant l'épée
qu'il remit à son sauveur, dans la pièce
où il l'a suspendue. Plus tard, dans le salon perse
de Monte-Christo, l'écrivain Alexandre Dumas l'entendra
prononcer à sa grande terreur une phrase à
paraître quelques semaines plus tard dans son Joseph
Balsamo, histoire du Comte de Cagliostro, lui-même
grand magnétiseur. Mais il ne suffit pas à
Alexis de s'enrichir et de devenir un dandy parisien,
il voudrait lui-même comprendre la nature singulière
de son don, l'origine de cette force qui s'empare de lui,
une fois endormi. Si le marquis de Mirville soutient qu'elle
provient du démon, le philosophe Delaage affirme
au contraire qu'elle est la manifestation la plus authentique
de l'âme originelle … « Qu'est-ce
que l'âme ? » demande Alexis à Eugénie,
la voyante bohémienne qu'il connaît depuis
l'enfance. Qu'est-ce que cette vie secrète
qui se détache de son corps, et voyage à
l'infini à travers l'espace et le temps... Au point
qu'il subit presque une sorte de dédoublement.
Car Alexis, soucieux de sortir du miroir, multiplie les
expériences médiumniques avec le temps.
Ainsi en est-il du théâtre où
la frontière entre l'état magnétique
et l'état éveillé devient si ténue
qu'il vit désormais dans une transe continuelle
à l'origine de ses premières crises nerveuses.
La quête sera longue et tourmentée. Mais
c'est finalement la musique de Berlioz qui prodiguera
au jeune somnambule le fluide libérateur. Qui lui
ouvrira les portes de l'âme. Quand il comprendra
enfin que c'est la discrète Eugénie qu'il
a toujours aimée et non Rose, l'actrice tapageuse
qu'il a épousée. Au même moment,
le magnétisme si cher à Messmer vit ses
derniers jours. Après le suicide de Nerval, précédé
de ce dernier mot à sa tante : « Ne m'attends
pas ce soir, car la nuit sera noire et blanche. »,
on crie au satanisme. Après la révolution
de 1830 et la vague du spiritisme qui, venue d'Angleterre,
déferle sur l'Europe, les esprits remplacent le
fluide, la croyance au surnaturel prend un air de breloque
amusante. Hugo fait tourner les tables à Jersey
et Napoléon III convoque David Homes pour qu'il
soulève les tables et fasse apparaître des
mains diaphanes. Socialisme, féminisme et magie
pactisent ensemble. Enfin la rationalité impose
ses lois. L'hypnose par électrothérapie
fait son apparition dans la clinique du Dr Elliotson.
Alexis vit assez vieux pour découvrir qu'en 1870,
la science a transformé le somnambulisme en hystérie
à la Salpétrière où Charcot
donne ses cours. Qu'importe, Alexis s'est affranchi du
siècle. N'a-t-il a trouvé le secret de l'âme
? « Il faut être somnambule pour connaître
la vie » confie-t-il.
Roman initiatique, nourri
des divers mouvements qui animèrent la question
du somnambulisme dans la seconde moitié du 19e
siècle, Alexis, la vie magnétique nous entraîne
dans des aventures innombrables et brosse une superbe
fresque historique.